Journée Spirituelle sur l’Orthodoxie par Pierre Gohier
Présentation par Antoine Gélineau responsable de la paroisse de Nantes et de l’atelier d’iconographie de St Florent le Vieil.
Vision de l’Église.
Racines communes, J .C. et les apôtres, même foi, mêmes sacrements. Pendant 1000 ans ce fut la même église une et indivise dans les différents patriarcats (Rome, Antioche, Constantinople…). Le patriarche de Rome a la primauté, le premier parmi les égaux
La rupture de 1054 entre l’Occident et l’Orient, entre Léon IX et Michel Cerulaire est une rupture politique. Léon IX veut uniformiser les rites et se heurte à l’opposition de Michel qui veut en faire autant (polémique à propos du pain : azyme ou levé ?). Le pape envoie des émissaires dont la légalité est contestée par Michel qui souhaite que les décisions soient prises de façon conciliaire. Les légats sont excommuniés, c’est la rupture.
En 1204, le saccage par les croisés (4ème croisade) de Constantinople et en particulier de Ste Sophie, le vol de la plus grande partie du trésor entérine le schisme. Il a fallu attendre 1965 pour voir Paul VI et le Patriarche Athénagoras renouer le dialogue.
Le schisme est donc consommé en 1204. Elle « devient » l’église des 7 conciles, les premiers qui sont l’assise de la foi chrétienne. Le Conseil Œcuménique est le décideur, il n’y a pas de pouvoir centralisé, les décisions doivent être prises à l’unanimité. Le concile décide des formulations dogmatiques, il ne reconnait pas par ex. l’infaillibilité pontificale et l’immaculée conception.
La communion des 7 conciles est matérialisée par une structure liturgique identique, utilisation du dyptique (liste des morts, liste des vivants appelés par leurs prénoms). A la communion, ils doivent nommer tous les autres patriarches sauf celui de Rome.
Cette communauté ne forme qu’un seul corps et c’est la communion qui les réunit. Il n’y a pas d’administration centralisée, les patriarches ne se rendent pas de comptes. C’est une communion d’églises indépendantes liées entre elles par la liturgie. Chacune est autocéphale, gérée par le synode qui propose et élit son patriarche. Elles partagent la tradition liturgique la foi la communion. Chez les Orthodoxes, Il n’existe pas de congrégations religieuses mais des « monachismes » où toutes les spiritualités sont acceptées. Les moines (qui ne sont pas mariés) ne vivent pas nécessairement en monastères.
Entre les patriarcats il existe une hiérarchie plutôt liée à l’histoire qu’an nombre de fidèles. Il existe une prééminence honorifique de Constantinople. 6 sont apostoliques (régions converties par les apôtres avant le 6ème siècle), le 7ème dont la Russie après le 12ème siècle.
L’épiscopat est le plus haut rang de la hiérarchie. Chaque évêque est le successeur des 12 apôtres et est ordonné par plusieurs évêques (succession apostolique oblige). Ils sont tous les successeurs des apôtres, ils sont tous égaux, pas de prééminence.
Les décisions sont prises en collégialité après avis des pairs. Le quotidien est régit par la tradition qui peut rappeler l’époque pré conciles. Les églises autocéphales sont indépendantes juridiquement et spirituellement mais elles peuvent avoir un pouvoir sur d’autres églises, comme en France, où le diocèse créé en 1923 (Russie) est actuellement rattaché à Constantinople. Il existe d’autres diocèses rattachés à la Russie, Grèce, Roumanie…. Il existe une assemblée des évêques qui se réunissent une fois/mois. Une église autocéphale peut être dirigée par un patriarche ou un archevêque, les évêques peuvent convoquer les synodes.
Actuellement il y a 700 000 Orthodoxes en France, en augmentation par l’émigration roumaine. Dans le monde il y a 150 à 200 M. d’orthodoxes dont 50 à 80 M. de pratiquants actifs.
Dans le monde orthodoxe, il y a 5 situations différentes :
- Méditerranéenne dans les pays à majorité musulmane.
- Alliance église état : Grèce, Chypre.
- Joug communiste en Europe Orientale : Russie, Serbie…
- La diaspora : émigrés, exilés et convertis.
- Petites communautés de mouvements missionnaires.
La conversion de la Russie ou le choix de Vladimir : l’Islam est triste, les Catho. jeûnent, les juifs ont été battus, les Orthodoxes ont une liturgie splendide, utilisent l’encens, vénèrent les icones. Pour ce côté un peu spectacle, ce décorum, en 988 Vladimir choisit cette religion.
Les églises orthodoxes connaissent 7 sacrements :
- Le Baptême par immersion.
- La Confirmation avec le St Chrême.
- L’Eucharistie sous les 2 espèces à partir du baptême.
- La Confession, réconciliation, pas de confessionnal. C’est une conversation sur les péchés à se faire pardonner, pas de pénitence mais une formule d’encouragement.
- L’Ordination par l’évêque.
- Le Mariage par dépôt d’une couronne, le dimanche après la liturgie.
- Le Sacrement des malades, pas nécessairement pour les mourants. Le mercredi saint, il est donné à tout le monde par onction d’huile au pinceau sur le front et les 5 sens.
La liturgie. Pour les Orthodoxes, la fête de Pâques est la plus importante, le mystère pascal est permanent, c’est de lui dont découle toute la liturgie, le Christ a vaincu la mort c’est plus important que Noël.
- Première partie : liturgie catéchumène : prières et lectures bibliques.
- Deuxième partie : dans les premiers temps, les catéchumènes sortaient pour cette seconde partie. Les chants sont compris comme des prières, seulement des voix humaines, pas d’instruments (ils ne prient pas).
Calendrier liturgique
Noël est célébré le 6 janvier sauf dans certaines paroisses (Nantes le 25 .12)
Pâques selon le calendrier Julien, date différente sauf une fois tous les 4 ans.
Œcuménisme.
L’orthodoxie est membre du conseil œcuménique des Eglises depuis 1931 et entretient des relations avec Rome et les Anglicans qui n’y adhèrent pas. Les relations avec Rome se sont bien détendues au 20ème siècle après la rencontre entre Paul VI et Athénagoras qui ont levés leurs anathèmes. Restent « en suspend », le ministère pétrinien (Pierre) à définir, le problème lié à l’infaillibilité pontificale.
Difficultés : La frilosité de Benoît XVI, le prosélytisme de certains (communauté de l’Emmanuel) en pays orthodoxe, le problème des Uniates (Roumanie). François qui est avant tout l’évêque de Rome améliore beaucoup les relations.
Tous les ans à Rome pour la fête de St Pierre et St Paul et à Constantinople pour la fête de St André, les Catho. et les Orthodoxes sont réunis.
L’église Orthodoxe ordonne des hommes mariés, il existe un clergé célibataire et un clergé marié. Ces derniers ont une expérience qui permet de mieux appréhender les situations. La femme du prêtre a beaucoup d’importance, elle fait beaucoup de choses (chantre) mais n’intervient pas dans la liturgie. Les évêques sont choisis parmi les moines, ils ne sont pas mariés. Le catéchisme est enseigné une fois par mois après la liturgie
En France une centaine de paroisses sont rattachées soit à Constantinople soit à d’autres patriarcats. Dans une même ville il peut y avoir plusieurs paroisses. Depuis 1 siècle, en France l’Orthodoxie s’est bien développée (immigration).
Actuellement un schisme est en train de se créer entre la Russie et l’Ukraine suite aux problèmes politiques (le patriarche de Kiev n’est plus nommé dans le dyptique).
L’Iconostase est plus réduite en France qu’en Russie. Nous avons une porte royale et 2 portes diaconales. Sur l’autel, l’évangile toujours présent rappelle l’importance de la parole de Dieu et la présence du Christ.
Une icône du XIIIème siècle « Le Mandilium » icône de procession, redécouverte en 1966 dans une étable représente le visage du Christ sur un linge en lien avec la dormition. C’est la première icône, point de départ de toute l’iconographie chrétienne, toujours à la voute du sanctuaire. Le regard n’est pas distrait par les détails, il est concentré sur le regard d’un homme, un dieu humilié, bafoué, le regard exprime l’humiliation la souffrance de Dieu. Dieu est un être que l’homme blesse ; sa gloire tient à sa souffrance à son amour pour l’homme, gloire associée à son abaissement à sa pauvreté mais il présente aussi un visage lumineux de bonté.
Les thèmes iconiques ont l’évangile pour source et les icones sont aussi vénérées que la croix et l’évangéliaire.
L’Ancien Testament donne la primauté à l’oreille sur la vue, on ne voit pas Dieu, il ne se réduit pas aux choses qu’il donne à voir, il s’accompagne de la parole. Les idoles ne parlent pas, elles se voient elles sont inexistantes en tant que Dieu. Dieu ne se voit pas, il parle : « Ainsi parle le Seigneur…. »
Comment apparait le visage de Dieu. On lui prête des caractéristiques propres à l’homme, il a une face, c’est sa présence, son identité infinie. Pour les hébreux, si Dieu est vivant il a une face. L’aspiration fondamentale du peuple juif est de connaitre la face de Dieu, ce Dieu inconnu ; il a un visage et il voit. La bible va plus loin, il a un visage, il se penche, descend pour voir et son regard est lié au regard que nous avons pour les pauvres. Son regard se veut attentif, il rejoint ceux qui le rencontrent, un regard de réflexion et non de réprimande (Pierre), regard de pardon, la parole renvoie au regard, regard et paroles se conditionnent mutuellement.
Dans le Nouveau Testament la vision et l’audition sont liées. En réponse au visage de Jésus, les 12 apôtres devront être témoins auriculaires et visuels. Sur le chemin d’Emmaüs, Jésus ne peut qu’être vu avec un regard nouveau de foi. C’est un regard nécessaire pour regarder et comprendre une icône. Cette fascination pour la face de Dieu montre que l’homme est le seul être qui a un visage, qui a accès à l’humanité. L’identité humaine se crée en face à face et en vis-à-vis où chacun se crée par et aussi avec l’autre, je le reçois des autres, je vois mon visage sur la face de l’autre.
L’icône de la Trinité d’André Roublev. La perspective inversée nous attire, nous invite à partager ce repas (tête du veau gras) symbole de la miséricorde de Dieu qui nous pardonne toujours. Les icones coptes représentent des personnages aux grosses têtes (prééminence du spirituel) qui nous regardent.
Les icones sont faites pour la prière. A St Florent le Viel, les ateliers commencent par la prière et une petite cérémonie.
Plus prosaïquement le support des icones est en tilleul, il est entoilé et reçoit 12 épaisseurs d’enduits. Elles sont peintes selon la technique de la tempera (jaune d’œuf) et les pigments utilisés sont naturels.
Ce sont les Orthodoxes qui fabriquent les icones mais elles ne sont pas orthodoxes. Elles appartiennent à la Chrétienté, à toute l’Eglise ; il n’y a pas d’ombres portées, la lumière vient de l’intérieur.